Suzanne Cassou de Saint-Mathurin : une mélédunienne d’exception

Suzanne de Saint-Mathurin est née le 19 juillet 1900 au château de La Salle, sur notre commune. Bachelière à 17 ans, elle décide contre la volonté paternelle de faire des études de médecine, et quitte la Saintonge en 1921 (même si elle y revient fréquemment par la suite). Elle prépare et obtient une licence d’enseignement des sciences naturelles. Pratiquant l’anglais dès sa petite enfance avec sa mère polyglotte, elle part comme lectrice à St Hilda’s College (université d’Oxford) et prépare en quatre ans, sous la direction de Rudler, une thèse sur « l’influence des idées biologiques de Diderot sur son oeuvre romanesque ». Elle étudie notamment la correspondance échangée entre Diderot et Catherine II de Russie. Elle soutient sa thèse en 1931, et reçoit le titre de Bachelor of Letters, équivalant alors de notre doctorat d’université.

Suzanne, son frère et sa sœur devant le château du Mung

C’est dans le cadre de ce travail qu’elle s’intéresse à Erasme Darwin, grand-père de Charles Darwin, et aux problèmes de l’origine de l’humanité. Par sa rencontre avec l’abbé Breuil en 1932, elle s’oriente plus spécialement vers la préhistoire, en classant avec lui les collections d’art préhistorique du Muséum d’histoire naturelle de Bordeaux, celles de Pair-non-Pair (Prignac-et-Marcamps, Gironde). Une solide amitié se forge, et elle visite avec lui de nombreuses grottes ornées en France et à l’étranger.

C’est son ami, l’abbé Breuil, qui l’invite à partir avec Dorothy Garrod étudier les grottes de Palestine. Elle rencontre également Germaine (Minne) Henri-Martin et participe aux fouilles de la Quina (Charente), puis à la fouille de Fontéchevade. Après avoir visité la grotte de La Marche à Lussac-les-Châteaux avec l’abbé Breuil, elle décide de reprendre les recherches sur le site du Roc-aux-Sorciers en 1946 en associant Dorothy Garrod qui accepte de fouiller avec elle. Elles découvrent ensemble les sculptures pariétales.

Elles bénéficient de subventions de la Wenner-Gren Foundation de New-York. Pour les besoins de la fouille, elle arme un bateau à La Rochelle, utilise ses talents de dessinatrice et crée des modèles pour le Bon Marché à Paris. Après le décès de Dorothy Garrod en 1968, Suzanne de Saint-Mathurin continue l’analyse de ses fouilles.

Les découvertes des deux femmes sont des blocs présentant des figurations sculptées, gravées et parfois peintes de bisons, de chevaux, de bouquetins, de félins et le portrait d’un homme. Ces blocs sont en réalité des fragments du plafond effondré de la cave Taillebourg. Seul un bison sculpté et peint est resté en place sur la voûte.

La frise sculptée in situ est découverte dès 1950. Elle est composée de bisons, de chevaux, de bouquetins, de félins, de corps de femmes, sans tête ni pieds, de visages humains. Le Roc-aux-Sorciers est un abri sous-roche occupé à plusieurs reprises au cours de la période dite du Magdalénien (du nom du lieu-dit “La Madeleine” en Périgord) il y a 15 000 ans. Il se situe dans la Vienne à 1,5 kilomètre d’Angles-sur- L’Anglin, classé plus beau village de France.

À la fin des années soixante, Suzanne Cassou de Saint-Mathurin est nommée chargée de mission au musée d’Archéologie nationale. En 1976, elle fait don au musée d’une sélection de blocs sculptés, gravés et peints provenant du plafond effondré du gisement. Ces blocs sont encore actuellement présentés au musée d’Archéologie nationale de Saint-Germain-en- Laye, où une salle porte son nom. Suzanne Cassou de Saint-Mathurin collabore également sur le terrain et pour les publications, bien qu’elle n’en ait signé que très peu.

Chevalier de l’ordre national du Mérite, membre de la Society of Antiquaries de Londres, elle décède le 28 août 1991. Elle est inhumée dans son pays natal, à Geay. Elle lègue le gisement à l’État et l’ensemble de ses collections et archives au musée d’Archéologie nationale. Elle donne aussi à l’État la reconstitution de la tête d’homme gravée et peinte d’Angles-sur-l’Anglin, dont elle avait fait l’acquisition. Suzanne de Saint-Mathurin laisse à la postérité une découverte exceptionnelle : l’abri sculpté magdalénien du Roc-aux-Sorciers, et une collection d’objets d’art retrouvables au musée d’Archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye, désormais rouvert. Son destin a fait d’elle une femme d’exception.

Les informations viennent de ce site : https://www.catalogue-roc-aux-sorciers.fr/html/12/collection/1_5_6.html

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